1 Introduction
Dans la langue des descendants des Burgondes, de la même façon que pour les autres langues germaniques, on distingue les substantifs en trois genres : Masculin, Féminin et Neutre et en deux nombres : Singulier et Pluriel.
Comme pour l’allemand et l’islandais, cette langue utilise des déclinaisons et différencie le Nominatif, l’Accusatif, le Génitif et le Datif.
Le germanique commun disposait de plusieurs types de déclinaisons que l’on retrouve presque complètement en burgonde. On distingue ainsi les déclinaisons fortes, ou vocaliques, des déclinaisons faibles, ou consonantiques. Le burgonde conserve quelques traces d’autres types de déclinaison comme celle en «-r», en «-nd» et les thèmes-racines.
Les déclinaisons vocaliques distinguent les thèmes en «-a» ou «-ja», ceux en «-o» ou «-jo», ceux en «-i» et enfin les thèmes en «-u».
Les déclinaisons consonantiques présentent trois thèmes : «-an», «-on» et «-in».
L’ensemble des différents types de déclinaison présente ainsi 20 formes différentes.

2 L’inflexion
Le burgonde n’a pas connu l’ampleur du phénomène de l’inflexion manifeste notamment en allemand et en islandais. Seules les déclinaisons en «-i» modifient le radical des substantifs au sein même de la déclinaison ; ainsi le radical Masculin gast- devient gest- et le Féminin núd (N.Sg.) devient nýdiz (N.Pl.). Mais, en l’occurrence, le Génitif singulier oppose gestis à núdis.

3 Les déclinaisons
3.1. Constantes
Les substantifs et adjectifs dont le radical se termine en –il ou en –ir ont des formes fléchies en –r- et –l- ; ainsi, vintir «hiver» fait au Génitif Sg. vintris et au Nominatif Pl. vintruz.
Le Datif Pl. présente deux formes en «-um», pour les déclinaisons simples, ou «-im», pour les déclinaisons fortes en «-i», «-ja», «-jo» courts, «-u» et les déclinaisons faibles en «-in», en «-jan» et «-jon».
Le Génitif Sg. présente toujours un «-s» en final.
Le Nominatif Pl. des Neutres est marqué par une voyelle alors que celui des Féminins et Masculins est marqué par un «-z» final.
Le Nominatif Sg. ne se distingue pas de l’Accusatif Sg.
L’Accusatif Pl. des Neutres est identique au Nominatif Pl.

3.2. Les déclinaisons fortes ou vocaliques
a) les thèmes en "-a"
Cette déclinaison regroupe des Masculins et des Neutres et se subdivise en deux grands types : déclinaisons en «-a» pur (Masculin type 1a, types irréguliers 1b, 1d, et Neutre type 1a) et en «-ja» (Masc. type 1c et Nt. type 1b).
Les types en «-ja» peuvent avoir été affectés par l’inflexion ; ainsi le mot
kyni, Neutre est à comparer au gotique kuni.
Par contre, la présence de deux consonnes entre le «-i» final et la voyelle précédente a empêcher cette inflexion ainsi, pour un mot proche comme :
kundi (got. kunþi).
  a wa ja na a ja
  Masculin 1a Masculin 1b Masculin 1c Masculin 1d Neutre 1a Neutre 1b
N.Sg. - - i na - i
A - - i na - i
G is vis is nis is is
D a va ja na a ja
             
N.Pl. uz vuz juz nuz u ju
A a va ja na u ju
G i vi i/je ni i i/je
D um vum im num um im
  dag kni herdi vagna vord kyni


Les anciennes déclinaisons en «-wa» (déclinaison type 1b) attestées en gotique ne se distinguent plus en burgonde de la déclinaison pure si ce n’est au Nom. et Acc. Sg. ou le «-v» du radical est absent. Ainsi,
æ, masc. "temps, éternité" devient ævis au Gén. Sg., æva Dat. Sg. … A cette catégorie, ajoutons quelques mots comme , Masc. «demeure», kni, Nt. «genou» et tri «arbre».
Le burgonde a développé une déclinaison particulière en «-na» (type 1d) qui conserve une finale en «-a» (germ. *
wagna, visl. vagn, onsq. vagna, alld. Wagen «véhicule») au Nom. et Acc. Sg. Les substantifs en «-in» (germ. *hemina, got. himins, visl. himinn, onsq. himna) se rattachent à cette déclinaison même s’ils possèdent une forme en «-in» au Nom. et Acc. Sg.
Certains parlers locaux ont créé également des formes en «-la» ou en «-ra» en lieu et place des formes majoritaires en «-il» ou «-ir» (
fugla au lieu de fugil «oiseau»). Ces formes ne sont que des variantes du type principal ne nécessitant pas une déclinaison particulière.

b) Les thèmes en «-o»
Ils ne regroupent que des Féminins et se subdivisent en trois grands types : déclinaisons en «-o» pur (type 1a) 2, et en «-jo» (avec radical bref, type 1b et radical long, type 1c).
Il faut rajouter, à ces types principaux, une déclinaison en «-no» (type 1d) regroupant des féminins appartenant autrefois aux déclinaisons fortes en «-i» et en «-o» dont le radical se terminait par «-n». De la déclinaison en «-i» est conservé le Gén. Sg. ; les anciens thèmes en «-wo» n’existent plus en onsquien.

  o jo jo no
  Féminin 1a courts 1b longs 1c 1d
N.Sg. a/- ja i

na

A a/- ja i na
G as is as nis
D i i/je i ni
         
N.Pl. uz juz iz

niz

A uz juz iz niz
G u ju u nu
D um im um num
  gifa vinja haidi tækna


Les types en «-jo» à radical court (type 1b) peuvent subir l’inflexion primaire ; ainsi
synja, «vérité», est à comparer avec le gotique sunja. En effet, le «j-» de la désinence est assimilé au radical et le substantif se décline comme s’il appartenait à la déclinaison de type 1a : soit sunj- et désinences -a, -is, i et pluriel uz, u, um.

c) Les thèmes en «i»
Celle-ci regroupe à la fois des Masculins et des Féminins. C’est un type de déclinaison relativement productif, dans la mesure où il a pu regrouper des mots appartenant en vieux-burgonde ou en germanique commun à d’autres déclinaisons.
La déclinaison Masculine (type 2) et la déclinaison Féminine (type 2) sont très semblables : seul les différencie Dat.Sg. en -a (Masc.) et en -e (Fém.).

  i i
Masculins Féminins
N.Sg. - -
A - -
G is is
D a e
N.Pl. iz iz
A i iz
G u u
D im im
  gast núd


Il s’agit des seules déclinaisons de la langue onsquienne qui possèdent une alternance de la voyelle ou de la diphtongue de la syllabe précédente au pluriel. Ainsi
gast (Nom.Sg.), fait-il gestiz (Nom.Pl.).
Cette alternance s’est, là aussi exceptionnellement, étendue au Gen.Sg. Masculin ; dans le cas présent,
gast aboutit à gestis.

d) les thèmes en "u"
Bon nombre de substantifs de cette déclinaison font maintenant parti de la déclinaison en «-i» ou en «-a».
Ce type regroupe des Masculins (type 3), des Féminins (type 3) et un seul substantif Neutre (type 2).
Les substantifs de cette déclinaisons ne subissent pas l’inflexion.

u u u
Masculins Féminins Neutre
N.Sg. - - -
A - - -
G is is is
D a a a
N.Pl. iz iz
A i iz
G je je
D im im
sun hand


Le pluriel a été pour partie refait sur les thèmes en «ja» et en «i» alors que les déclinaisons gotique et vieux-burgonde font : -jus, -uns, -iwe, -um.
Pour le Neutre, ne subsiste plus que le mot
«bétail», dont la déclinaison est proche des neutres en «-on». Ce mot n’a pas de pluriel.

e) Récapitulatifs des déclinaisons fortes
• Les masculins

a wa ja na i u
1a 1b 1c 1d 2 3
N.Sg. dag kni herdi vagna gast sun
A dag kni herdi vagna gast sun
G dagis knivis herdis vagnis gestis sunis
D daga kniva herdja vagna gasta suna
N.Pl. daguz knivuz herdjuz vagnuz gestiz suniz
A daga kniva herdja vagna gesti suni
G dagi knivi herdje/i vagni gestu sunje
D dagum knivum herdim vagnum gestim sunim
jour genou berger véhicule hôte fils



• Les féminins

o jo jo no i u
1a longs - 1b courts - 1c 1d 2 3
N.Sg. gifa haidi vinja tækna núd hand
A gifa haidi vinja tækna núd hand
G gifas haidas vinís tæknis núdis handis
D gifi haidi viní tækni núde handa
N.Pl. gifuz haidiz vinjuz tæknuz nýdiz handiz
A gifuz haidiz vinjuz tæknuz nýdiz handiz
G gifu haidu vinju tæknu nýdu handje
D gifum haidum vinim tæknum nýdim handim
cadeau lande pâture signe besoin main



• Les neutres

a ja u
1a 1b 2
N.Sg. vord kyni
A vord kyni
G vordis kynís féis
D vorda kynja féa
N.Pl. vordu kynju  
A vordu kynju  
G vordi kyní  
D vordum kynim  
mot parenté bétail



3.3. Les déclinaisons faibles ou consonantiques
a) Les thèmes en «-n»
En germanique, on distinguait dans ce type de déclinaison, les thèmes en «-an», regroupant des Masculins, en «-on» contenant des Neutres et des Féminins et les thèmes en «-in» ne comportant que des Féminins 4. L'onsquien reconnait ces trois thèmes, mais a quasiment complètement effacé les déclinaisons originales.

an jan on on jon in
Masculin Masculin Neutre Féminin Féminin Féminin
N.Sg. a ja u a ja i
A a ja u a ja i
G is is is is is is
D a ja u a ja i
N.Pl. na na na na na na
A na na na na na na
G na na na na na na
D num nim num num nim nim
blóma vilja hertu tunga kirka sýki
  fleur volonté cœur langue église maladie

En effet, il ne connait plus que quatre cas hérités de la déclinaison faible :
- le singulier (pour exprimer les nominatif, accusatif et datif)
- le Génitif singulier
- le pluriel (pour exprimer tous les cas)
- le datif pluriel
Les deux derniers cas sont identiques quelque soit le genre du nom et le type de déclinaison :
hertu (Sg.) «cœur», hertis (G.Sg.) et hertna (Plur.), hertnum (D.Pl.) pour les Neutres en «on»,
tungu (Sg.) «langue», tungis, tungna, tungnum pour les Féminins en «on»,
lygi (Sg.) «mensonge», lygis, lygna, lygnim pour les Féminins en «in»,
kirka (Sg.) «église», kirkis, kirkna, kirknim pour les Masculins en «an».
Les formes en «-nan», «-nin», «-non» ont disparu et les mots de ces séries ont rejoint les déclinaisons fortes en «na», «no» et «i», tel hana «coq.
Seuls les substantifs des thèmes en «-in» peuvent avoir subi l‘inflexion ; le gotique
siukei s’apparente à l'onsquien sýki «maladie».

b) Le thème en «-r»
Cette déclinaison ne regroupe que des mots marquant la parenté : bródir «frère», svistir «sœur», fadir «père», módir «mère» et dótir «fille». Ces mots restent non fléchis en toute circonstance.

  r
  Masc./Fém.
N.Sg. ir
A ir
G irs
D ir
   
N.Pl. ru
A ru
G ri
D rum
  bródir
  frère

c) Le thème en «-nd» et les thèmes-racines
Encore considéré en germanique commun (ainsi qu’en gotique, en vieux-burgonde et en vieux-saxon) comme la flexion des participes présents pris substantivement, le thème en «-nd» onsquien ne compte plus qu’un seul mot masculin frænd «ami, amant» qui est un ancien participe présent ... Les participes présents substantivés ont rejoint, depuis le vieux-burgonde, la déclinaison en «-a».

  racines / nd
  Masc./Fém.
N.Sg. -
A -
G s
D -
   
N.Pl. -
A -
G i
D um
  borg / frænd
  château / ami

Cette déclinaison se rattache à celle, plus ancienne, des «thèmes-racines». Par rapport au germanique commun, celle-ci ne comporte plus que quelques mots courants, tels borg «château» ou brust «sein» pour les féminins et man «homme» pour le masculin.


3.4 Les noms propres
1. Les toponymes
D’une façon générale, les noms de lieux sont indéclinables et en particulier tous les noms «étrangers» :
ik far til Paris, Berlin, Rom … »je vais à Paris, Berlin, Rome …”
Les noms burgondes ou «burgondisés» possèdent tous au moins un «cas nominal» (radical du nom de lieu) et un génitif.
• Si le nom a une étymologie indéterminée, il est considéré comme masculin, avec génitif en -(i)s : Basel (Suisse, Bâle) et G. Baslis, Thann (Alsace), G. Thanns
• Si le toponyme comporte en final un substantif du type berg, montagne, borg, château,ville, beki (ou localement bek), ruisseau, etc., celui-ci fait un génitif en accord avec la déclinaison de ce mot : Hánborg, G. Hánborgi, «Belfort» Rúdaberg, G. Rúdabergis, «Rougemont»,
• Les noms avec la finale -ings font un génitif en -ingu : Dúrings, G. Dúringu, «Dorans, Denney»,
• Certains toponymes sont considérés comme des substantifs ou des composés substantivés ; ils se déclinent alors entièrement : N. et A. Rudja «Leval-sous-Rougemont», G. Rudje, D. Rudim.
• Un toponyme comme Milhúsu, «Mulhouse», est considéré comme un pluriel : Nt. G. Milhúsi .
• Les gentilés se forment sur la base du toponyme suivi de «-ir» (Masc. déclinaison en «a») ou de «-(i)ra» pour les Féminins (en «o») : Mílhusir, Mílhusra «Mulhousien(ne)», Dúringir «habitant de Denney», ...

2. Les noms de familles
Ils sont indéclinables quelques soient leur formation, seul le prénom connaît un génitif, en -(i)s pour les hommes et en -(a)s pour les femmes : Ján, G. Jánis, Jean et Maria, G. Marias, Marie.